Freelance : quel statut juridique adopter ?

Exercer une activité professionnelle rémunérée exige de disposer au préalable d’un statut juridique. Dans le cas d’un freelance exerçant seul, ce statut peut prendre différentes formes : micro-entreprise, entreprise individuelle, SASU ou EURL. A chacune ses avantages et ses inconvénients au regard de votre situation et de votre projet. Revue de détail. 

Les structures en nom propre : microentreprise et entreprise individuelle

Ce qui les rassemble :

Ces structures sont dites en « nom propre » car elles consignent obligatoirement sur la facture émise par le freelance son nom et son prénom. 

Avantage : elles bénéficient de formalités comptables, fiscales et juridiques allégées (pas de personne morale à créer, pas de capital minimum à constituer, pas d’assemblée générale à convoquer, pas de comptes annuels à approuver…). 

Inconvénient : elles impliquent une responsabilité « illimitée ». Traduction : en cas de dettes professionnelles, les saisies peuvent affecter votre patrimoine personnel, à l’exclusion de votre résidence principale.

Côté fiscalité, vous êtes redevable de l’impôt sur le revenu et non sur les sociétés. Concrètement, cela signifie que les revenus issus de votre activité freelance seront intégrés dans le revenu global de votre foyer et serviront à déterminer la tranche d’imposition du foyer fiscal.

Enfin, pour les demandeurs d’emploi qui perçoivent des indemnités chômage, sachez que :

  • Votre chiffre d’affaires cumulé à vos allocations chômage ne pouvant excéder le salaire journalier de référence, le reliquat des allocations non versées sera reporté, allongeant d’autant la période d’indemnisation. 
  • vous pouvez bénéficier de l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise (ARCE). En pratique, vous déclarez votre projet à Pôle emploi et percevez 45% des allocations chômage qui restent à vous verser sous forme de capital. 

Ce qui les distingue :

  • En micro-entreprise, les cotisations sociales sont calculées sur le CA encaissé. En entreprise individuelle, elles sont calculées à titre provisionnel et font ensuite l’objet d’une régularisation sur la base des revenus déclarés dans la déclaration sociale des indépendants (DSI). Il est donc nécessaire de conserver de la trésorerie pour s’acquitter de ses obligations à l’échéance fixée par l’administration.
  • En micro-entreprise, vous ne pouvez pas déduire de votre CA les cotisations sociales et les charges de fonctionnement liées à votre activité. A titre de compensation, vous bénéficiez d’un abattement forfaitaire avant impôt dont le taux varie selon l’activité de votre entreprise : 34% si vous faites de la prestation de services, 71% pour les activités d’achat-revente. En entreprise individuelle, les cotisations sociales représentent environ 45% du revenu imposable.
  • En micro-entreprise, les cotisations sociales étant calculées sur le CA encaissé, l’absence de CA entraine l’absence de prélèvements. En entreprise individuelle, des cotisations minimales sont dues, même en l’absence de revenu.

Pour approfondir :

  1. La micro-entreprise : pour jouer la carte de la simplicité

Pour qui ?

Longtemps connu sous le nom d’auto-entrepreneur, ce statut est idéal pour qui souhaite tester une activité ou exercer une activité secondaire. En effet, on ne peut dépasser un certain montant de chiffre d’affaires, soit :

  • 72 600 euros si vous faites de la prestation de services
  • 176 200 euros si vous exercez une activité d’achat-revente

Au-delà de ces seuils, vous devrez changer de statut.

Quelles démarches ?

S’enregistrer ne prend que quelques minutes. Il suffit de se connecter sur :  https://www.autoentrepreneur.urssaf.fr/portail/accueil/creer-mon-auto-entreprise.html

Quels prélèvements ?

Il est à noter que sous conditions de revenu, vous pouvez faire le choix du prélèvement libératoire. Cela permet de régler en un seul versement, à la fois l’impôt sur le revenu et les cotisations sociales obligatoires. Il suffit alors d’appliquer un pourcentage supplémentaire sur vos recettes, de 2,2% si vous faites de la prestation de services, de 1% pour les activités d’achat revente.

En résumé :

1- Pour les prestataires de services : 

exonération de TVA jusqu’à 34 000 euros de CA. Au-delà, vous devrez collecter la TVA pour le compte de l’Etat en appliquant un taux de 20%.

+ ponction de 22% sur le CA au titre des cotisations sociales (24,2% en cas de prélèvement libératoire)

+ calcul de l’impôt sur le revenu après abattement de 34%. Dit autrement, le taux d’imposition correspond à 66% de votre CA.

2- Pour une activité d’achat-revente 

+ exonération de la TVA jusqu’à 85 500 euros

+ ponction de 12,8% au titre des cotisations sociales (13,8% en cas de prélèvement libératoire

+ calcul de l’impôt sur le revenu après abattement de 71%

2. L’entreprise individuelle : pour ceux qui souhaitent déduire leurs charges

Pour qui ?

Pour ceux qui visent tant la simplicité au quotidien que l’optimisation des prélèvements. En effet, les revenus soumis à l’impôt correspondent aux bénéfices de l’entreprise, soit le chiffre d’affaires amputé des charges déductibles (frais de fonctionnement, de déplacement, de bouche, de formation…) et des cotisations sociales. 

Quelles démarches ?

Pour déclarer une EI, vous devez vous rapprocher du Centre de formalités des entreprises (CFE) dont vous dépendez. A noter : à partir de 2023, le guichet unique de l’Inpi prendra le relais. 

Quels prélèvements ?

L’imposition porte sur les bénéfices, soit le CA après déduction des charges de fonctionnement et des cotisations sociales, ces dernières s’élevant à 45%. 

Attention : si votre CA augmente dans une plus forte proportion que vos frais, vous aurez davantage de cotisations et d’impôts à acquitter. L’optimisation est donc limitée. 

3. Les sociétés : EURL et SASU

Revenons un instant sur ces acronymes :

EURL pour Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité limitée 

SASU pour Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle.

Ce qui les rassemble :

A la différence des entreprises en nom propre, les sociétés unipersonnelles nécessitent d’entreprendre un certain nombre de formalités lors de leur création comme : 

La constitution d’un capital social

La rédaction des statuts 

La publication d’un avis de création 

La demande d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés

Etc.

Elles doivent en outre tenir une comptabilité selon des règles précises qui les oblige le plus souvent à avoir recours aux services d’un expert-comptable (coût de la prestation entre 19€/mois pour les formules en ligne à 5000 € par an).

En tant que personnes morales, elles sont assujetties à l’impôt sur les sociétés. L’impôt est calculé à partir du chiffre d’affaires duquel on déduit :

Les frais professionnels

Les cotisations sociales

La rémunération 

On obtient ainsi le bénéfice brut qui est soumis à l’impôt sur les sociétés, selon un barème différent que l’on se situe en-deça ou au-delà de 38 120 euros : dans le premier cas, le taux d’imposition est de 15%, dans le second, il est de 26,5%.

En découle le bénéfice net qui peut être versé sous forme de dividendes ou mis en réserve, pour faire face à des dépenses futures. 

Enfin, gros avantage : dans le cas où la société fait face à des dettes, celles-ci ne sont imputables au dirigeant qu’à hauteur de ses apports, ce qui est beaucoup plus protecteur que pour les entreprises en nom propre.

Ce qui les distingue :

Le président de SASU est affilié au régime général de la sécurité sociale tandis que le gérant d’EURL relève du régime des travailleurs indépendants. Conséquence : le président de SASU bénéficie d’une meilleure couverture sociale bien qu’il ne puisse prétendre aux allocations chômage en raison de son statut de mandataire social.

Les dividendes sont moins fiscalisés pour la SASU que pour l’EURL, à hauteur de 30% pour la première, de 55% pour la seconde.

En revanche, le taux de cotisation sociales est de 75% pour une SASU, bien supérieur à celui d’une EURL (45%). 

Pour approfondir :

La SASU : pour une protection sociale plus avantageuse mais plus coûteuse

Pour qui ? 

Plusieurs profils de dirigeants se détachent, en fonction de l’arbitrage qu’ils opèrent entre rémunération et dividendes. Le dirigeant de SASU peut en effet opter pour : 

Le versement d’une rémunération qui donne droit au statut d’assimilé salarié et donc à une protection sociale avantageuse, à l’exclusion du risque chômage pour lequel il ne cotise pas.

Le versement de dividendes une fois par an

Le cumul des deux, rémunération et dividendes.

Quelles démarches ?

Vous devez constituer un dossier de création d’entreprise, avec l’appui éventuel d’un conseil (coût de la prestation entre 500 et 2000 euros) puis le déposer auprès du greffe du tribunal de commerce chargé de l’immatriculation des sociétés et de la délivrance de l’extrait Kbis.

Quels prélèvements ?

S’il perçoit une rémunération, le président de SASU est ponctionné de 75% au titre des cotisations sociales.  Mais comme nous venons de le voir, il s’assure ainsi une protection dans des domaines aussi sensibles que la maladie, les accidents du travail, la retraite.

Son bénéfice brut est soumis à l’impôt sur les sociétés, à hauteur de 15% s’il est inférieur à 38 120 euros, ou de 26,5% s’il est supérieur.

Ses dividendes sont taxés à 30%, soit 17,2% au titre des prélèvements sociaux et 12,8% au titre de l’impôt sur le revenu.

L’EURL : pour maximiser votre gain dans l’immédiat  

Pour qui ?

Pour ceux qui privilégient le présent.

Quelles démarches ?

Comme pour la SASU, vous devez constituer un dossier de création d’entreprise, avec l’appui éventuel d’un conseil que vous soumettrez ensuite au greffe au tribunal de commerce pour immatriculation de votre société et délivrance de l’extrait Kbis.

Quels prélèvements ?

En contrepartie de votre activité, vous pouvez vous verser tous les mois une rémunération qui fera l’objet de prélèvements sociaux à hauteur de 45%. Cette taxation s’effectue par acompte puis régularisation. 

Au regard du taux de cotisation, vous bénéficiez d’une couverture sociale minimale, ce qui oblige la plupart des travailleurs indépendants à se constituer un complément de retraite par capitalisation (contrat Madelin). 

En parallèle, une fois par an, et après avoir acquitté l’impôt sur les sociétés, vous pouvez vous distribuer des dividendes, taxés à 55%.

Quel statut juridique adopter ? Pour conclure :

Il n’y a pas de statut idéal, simplement une forme juridique plus adaptée que les autres à votre projet. Pour la déterminer, vous devez prendre en compte de nombreux critères, comme la nature de votre activité, le patrimoine à protéger, votre âge et votre situation (est-ce votre activité principale ? êtes-vous demandeur d’emploi ?…) Autant de paramètres à intégrer avant de vous lancer. Mais une chose est certaine, créer son entreprise est une formidable aventure. Et définir la forme juridique qu’elle prendra est un premier pas vers sa concrétisation.

Suggestions de lecture

Les outils des géants : leurs clés pour réussir

Les 7 habitudes de ceux qui réalisent tout ce qu’ils entreprennent

Laisser un commentaire

Philippe Douale

Expert en évolution professionnelle, LinkedIn & Networking

Philippe accompagne les cadres et les dirigeants, en évolution professionnelle, pour trouver leur prochain poste, en outplacement complet (6 mois, 9 mois, un an, où jusqu’à la fin de la période d’essai), ou en outplacement en version accélérée (3 mois).
Philippe propose également des accompagnements spécialisés sur votre profil LinkedIn, que vous désiriez utiliser celui-ci pour trouver votre prochain poste, faire décoller votre business en tant que freelance, ou soigner votre image professionnelle en tant que dirigeant en poste.
Si vous êtes freelance, ou souhaitez le devenir, Philippe vous accompagne pour prendre ou reprendre un bon départ et faire décoller votre activité.

Partagez
Tweetez
Partagez