Les compétences du 21e siècle

Titre : Les compétences du 21e siècle

Sous-titre : Comment faire la différence ? 

Auteurs : Jérémy LAMRI

Editeur : Dunod, 2018

Le pitch

Un autre monde est possible. Tel est l’enseignement majeur de l’ouvrage de Jérémy Lamri, tiré de sa thèse de doctorat en sciences cognitives. A travers ce plaidoyer pour une déconstruction des mécanismes dominants dans notre société – obéissance, consommation, contrôle – l’auteur souligne l’importance de continuer à développer « les compétences qui nous permettent d’apprendre, de réfléchir et d’interagir » afin d’envisager un avenir tourné vers le bien-être individuel et collectif. Mais avant de parvenir à ce résultat, il nous aura fait cheminer à travers les âges et les concepts pour bien cerner comment l’homme crée de la valeur et comment il continuera de le faire malgré les discours pessimistes annonçant son remplacement par les machines. Passionnant !

Les compétences du 21e siècle – Pourquoi il faut avoir lu ce livre ?

Titulaire d’un doctorat en sciences cognitives, Jérémy Lamri est le guide idéal pour nous initier aux compétences du 21e siècle. Oui, les fameuses « soft skills » qui depuis quelques années ont pris une place prépondérante dans les manuels managériaux. Et pour cause : « Près d’un métier sur deux pourra être remplacé par une machine sous quinze ans » nous précise l’auteur. Est-ce la fin du travail ? En tout cas, la fin du travail axé essentiellement sur les compétences techniques dont l’obsolescence intervient désormais entre 6 mois et 5 ans. De quoi nous inciter à mobiliser d’autres capacités et notamment les 4C que sont la créativité, l’esprit critique, la communication et la coopération : le cocktail gagnant « pour créer de la valeur et s’épanouir dans une économie fortement digitalisée. » Alors, place à la découverte de ces compétences dites cognitives et de leur impact sur notre avenir professionnel et personnel.

Les compétences du 21e siècle – Le résumé 

Je vous propose d’entamer ce résumé par une anecdote figurant dans l’ouvrage de Jérémy Lamri : une équipe de cinq inconnus s’était constituée pour jouer en ligne. Après plusieurs victoires, ils décidèrent de se rencontrer. Quelle ne fut pas leur surprise de découvrir un casting improbable au regard des standards du recrutement habituels. Il y avait là un énarque de 38 ans, un universitaire de 30, un décrocheur de 22, un chef d’entreprise de 40 ainsi qu’un adolescent de 14 ans que le groupe reconnaissait unanimement comme le meneur. 

La parabole est édifiante : en nous invitant à analyser les performances individuelles et collectives au regard d’une situation donnée, elle remet en question la suprématie du diplôme et de l’expérience liée à l’âge, repères pourtant bien installés dans nos sociétés. Ce faisant, elle nous invite à nous reconnecter avec l’histoire de l’humanité. 

L’homme en mode « Work in progress » depuis 3,5 millions d’années

Comment l’homme est-il parvenu à dominer l’ensemble des espèces ? Comme le rappelle Jérémy Lamri, sa constitution fragile le prédestinait plutôt à stagner au niveau des anchois et des cochons dans la chaine alimentaire. Alors que s’est-il passé ? Sa capacité d’adaptation a fait la différence. Du chasseur-cueilleur au concepteur de métavers, l’homme n’a cessé d’innover afin d’acquérir la maîtrise de son environnement, voire de créer des mondes parallèles. Cette formidable agilité, il la doit à son cerveau, et plus précisément à la partie de celui-ci appelée cortex préfrontal. « Cette zone, chez les autres espèces, sert principalement à contrôler le mouvement volontaire, donc tout ce qui ne relève pas des réflexes. Le développement rapide et important du cortex préfrontal chez l’homme a créé de nouvelles fonctions… comme la conscience, la mémoire de travail, le raisonnement, etc. » Autant de facultés qui nous ont permis d’évoluer plus vite que les autres espèces mais dans quelle direction ?

Pour l’auteur, l’homme, consciemment ou non, construit sa trajectoire en prenant appui sur les cinq forces suivantes :

  1. Une information toujours plus dense et accessible
  2. Une interconnexion entre individus toujours plus globale
  3. La suppression des tâches les moins satisfaisantes
  4. Le besoin de standardiser, c’est-à-dire « de capter la meilleure pratique pour la reproduire facilement ensuite. » 
  5. L’existentialisme qui pousse chacun d’entre nous à chercher sa raison d’être.

Au regard de ces différents paramètres, la société numérique dans laquelle nous évoluons actuellement nous positionne à un stade déjà très avancé, au bémol près que le digital n’est pas en capacité de nous révéler le sens de notre existence. Mais gageons qu’une future licorne saura nous mettre sur la voie : prenant la parole à Davos en 2018, Jack Ma, fondateur d’Alibaba, incitait ses contemporains à développer ce qui les différenciait des machines, à savoir la créativité, les émotions, la solidarité etc., en bref leurs compétences cognitives. 

Identifier les compétences cognitives 

Comme tous les universitaires, Jérémy Lamri est un homme précis. Le chapitre qu’il consacre à la définition du mot « compétences » et à son émergence dans l’univers professionnel au tournant des années 70 en est l’illustration. Jusqu’alors, le terme prédominant était « qualification » et il était rattaché à un poste. Les individus étaient donc qualifiés ou non pour un poste. 

La désindustrialisation post Trente Glorieuses et l’émergence d’un chômage de masse vont modifier cette approche. Désormais, l’individu devient le point de focalisation car il s’agit de déterminer ses atouts dans le cadre d’une éventuelle reconversion. Mais la jauge demeure essentiellement axée sur les compétences techniques ainsi que sur le diplôme, l’ancienneté, le statut hiérarchique… 

Ce n’est que très récemment que les « soft skills » ont fait leur entrée dans le vocabulaire managérial. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les Français ont tendance à privilégier cette appellation anglo-saxonne, ce qui pour Jérémy Lamri est une manière inconsciente de s’éviter de redéfinir ce qu’est précisément une compétence. De nombreux chercheurs s’y sont pourtant essayés, comme Richard Boyatzis, Maurice de Montmollin, Serge Michel et Michel Ledru, Guy Le Boterf, Michel Parlier, Claude Lévy-Leboyer, etc. Cette liste, non exhaustive, témoigne de la difficulté à appréhender ce qu’est une compétence. 

D’où la conviction de l’auteur qu’il est vain de s’appesantir sur un terme aussi générique. Mieux vaut s’intéresser à des ensembles plus petits, à savoir les 4 catégories de compétences suivantes :

  • Les compétences techniques « que nous pouvons acquérir par la formation et l’expérience, celles que l’on peut apprendre, comme par exemple l’anglais, le code informatique, le marketing. »
  • Les compétences comportementales et motivationnelles, « comme par exemple l’extraversion, l’ouverture à l’expérience, la conscience professionnelle, la stabilité émotionnelle, ou la convivialité » qui relèvent de processus d’apprentissage beaucoup plus complexes que les précédentes. 
  • Les compétences cognitives « qui nous permettent d’apprendre, de réfléchir et d’interagir… Il s’agit de compétences très complexes, qui sollicitent beaucoup de fonctions différentes du cerveau, depuis le cortex préfrontal, et qui sont les compétences qui nous permettent d’améliorer les autres compétences. » 
  • Les compétences citoyennes qui « montrent notre positionnement en tant qu’individu faisant partie d’un groupe social. On parle de l’éthique ou du leadership par exemple. »

Au regard de cette typologie, les compétences du 21è siècle, titre de l’ouvrage, sont clairement assimilées aux compétences cognitives. Et plus précisément aux 4 compétences que sont la créativité, l’esprit critique, la communication et la coopération (les 4 C). La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible de les développer à tout âge ; la mauvaise, c’est que nos systèmes éducatif et productif n’ont pas encore intégré cette nécessité absolue.

Développer les compétences du 21e siècle 

Il est possible de développer nos compétences cognitives tout au long de la vie. La raison tient à la plasticité de notre cerveau qui ne connait pas de date de péremption. Comme le rappelle l’expert en neurosciences Stanislas Dehaene, quatre facteurs peuvent faciliter cet apprentissage, à savoir :

  • L’attention qui permet de nous canaliser sur l’objet à étudier
  • Le retour d’information qui consiste à valider le fait que la connaissance a été correctement assimilée
  • L’engagement actif qui nous invite à passer de la théorie à la pratique
  • La consolidation qui, à force de répétitions, nous permet d’intégrer définitivement ce que nous apprenons.

D’autres paramètres sont également partie prenante dans le processus d’apprentissage et notamment le fait de :

  • Prendre en compte la singularité de chaque individu, conformément au concept d’intelligences multiples, développé par le sociologue Howard Gardner, que nous avons abordé dans le résumé de Soft Skills – Développez vos compétences comportementales
  • Faciliter les interactions entre pairs et les travaux collaboratifs

Certains systèmes éducatifs privés (écoles Montessori, école 42…) et publics (système finlandais) appliquent tout ou partie de ces recommandations mais il faut bien l’avouer, l’approche éducative traditionnelle ne prend pas suffisamment en compte ces besoins. Ce qui conduit à des alertes régulières, formulées notamment par l’OCDE, et portant sur le fait que :

  • L’augmentation en continu des connaissances des étudiants ne s’accompagne pas d’un renforcement de leur capacité de réflexion et d’analyse
  • Les étudiants développent peu d’esprit critique vis-à-vis des connaissances et des méthodes qui leur sont transmises
  • Les étudiants ont des difficultés à identifier leurs compétences cognitives.

Même constat dans la vie professionnelle où les méthodes de recrutement et les formations tout au long de la vie sont rarement focalisées sur l’essentiel, à savoir disposer de collaborateurs « capables de résoudre des problèmes, fédérer des équipes, accompagner les changements. »

Prenons l’exemple du recrutement où, à quelques exceptions près, le CV reste le document phare pour présélectionner les candidats. Conséquence : l’autodidacte, ou une personne au bagage socio-culturel différent du modèle élitaire traditionnel (passage par les grandes écoles…), a toutes les chances d’être éconduit a priori. 

Et pourtant, trois éléments devraient entrer en ligne de compte à cette étape :

  • La performance attendue : est-ce que le candidat saura remplir les missions qu’on souhaite lui confier ?
  • Le comportement : est-ce que le candidat saura s’intégrer dans sa nouvelle entreprise et dans un collectif de travail ?
  • Le potentiel : est-ce que le candidat saura répondre aux challenges qui ne manqueront pas d’émerger au fil des évolutions de l’entreprise ?

Face à ces trois interrogations, un CV apporte peu de réponses. Et les entretiens qui complètent le processus de sélection pas davantage. Pourtant il existe déjà de nombreuses méthodes pour évaluer les compétences cognitives et les 4C. Jérémy Lamri recense les principales dans son livre, tout en soulignant la singularité de leur approche : « À l’inverse des compétences techniques, elles ne reposent pas sur un acquis théorique. Les 4C ne peuvent être exprimées qu’en situation, dans un contexte donné. »  Objectivement, rares sont les recruteurs formés à ces nouveaux procédés.

Mais des avancées s’opèrent : « L’approche compétences est en train de changer radicalement la logique des DRH. » Elle se décline essentiellement dans trois directions :

  • La formation, et plus précisément les formations à l’adaptabilité qui, à ce stade, sont encore très peu développées
  • L’environnement de travail dont l’impact sur la créativité est désormais bien documenté
  • Les méthodes de travail qui, comme le design thinking désormais très populaire dans les entreprises, permettent de trouver des solutions collaboratives face à un problème déterminé.

En résumé, il s’agit désormais de faire émerger « l’organisation apprenante » et face à ce défi, chaque entreprise doit élaborer sa propre méthode.

Vers une société de l’intelligence collective

Tenant de la tradition humaniste, l’universitaire Lamri nous incite dans la dernière partie de son ouvrage à nous décentrer de la question des compétences cognitives utiles à l’entreprise pour mieux saisir leur impact sociétal.

Comparant notre époque à celle de la Renaissance, il nous montre comment, dès le XIVe siècle, une série d’inventions ont permis de détourner une partie de la population européenne de tâches à faible valeur ajoutée pour lui ouvrir la voie des arts et de la philosophie. 

Ce qui se joue à l’heure actuelle est du même ordre : la montée en puissance des machines est l’occasion pour l’homme d’envisager une sortie par le haut, en mettant les compétences du 21e siècle « au service d’un monde plus sobre, plus juste et plus durable. » A chacun de s’emparer désormais de cette feuille de route.

2 réflexions au sujet de “Les compétences du 21e siècle”

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Philippe Douale

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